LE BIEN PUBLIC : Une messe pour l'éternité

Il est des instants où l’on finit par douter de l’épaisseur de l’espace : des instants entre ciel et terre où l’on se sent glisser lentement vers un état de recueillement.

 

La musique de Jacques Rebotier sonne comme un guide vers cette sérénité à laquelle nous aspirons tous.
C’est dans un silence respectueux qu’ont donc pris place, samedi en l’église du Sacré-Coeur, les nombreux auditeurs venus découvrir cette œuvre insolite de Jacques Rebotier, achevée l’an passé après deux années d’un projet de composition qui tenait non seulement à cœur à son compositeur mais aussi à Eric Colliard.
Le Requiem de Rebotier n’a pas grand-chose à voir avec nombre de compositions du genre. s’il reste d’inspiration résolument religieuse, c’est directement à l’homme qu’il s’adresse : à celui qui doute, qui a peur devant la fin, que l’esprit des morts hante comme un rappel de sa finitude, comme un signe du néant proche. Mais cette angoisse n’est qu’un moment. Ce requiem doit conduire celui qui l’écoute vers le chemin de l’éternité dans la quiétude et la sérénité.

C’est sans doute dans cette double présence de la mort et de la survivance que le Requiem de  Jacques Rebotier trouve son sens et sa complexité aussi, sa justesse et son extrême gravité.
Rien d’étrange alors que son compositeur l’ait voulu volontairement épuré de toutes fioritures, de tout accent baroque ou romantique, indatable, semblant emprunter directement « d’une musique des cieux », venue d’un temps qu’on n’imagine très loin. Et pourtant, drôle de formation, sept clarinettes, un accordéon et un cymbalum, pour accompagner… non pour laisser monter la voix troublante de la soliste soprano Françoise Kubler.
Pour cette occasion, la Maîtrise de Dijon participait à cette messe des morts, servant remarquablement avec les jeunes solistes, sous la direction de Rachid Safir, un requiem qui ne peut laisser indifférent.

 

Chrystel SKOWRON
(6 novembre 1995)

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